Rêve de Bresse !!!
Rêve de Bresse…
Dernier rêve, l’envol d’un bel emplumé…
J’ai voulu imiter Mozart et je me suis pris à rêver
que j'avais aussi une très belle plume et que j'étais cuisinier, tout au moins
je le croyais. Ce matin-là, j'e suis rentré dans ma cuisine, bien décidé à
plumer ce beau poulet bressan que je pensais mort, encore tout auréolé de sa
cocarde tricolore et de ses plumes blanches encore immaculées. 2 kilos, ne bien
belle bête qui a dû être bien nourri pensais-je. Je me suis assis à ma table de
plumage et sans qu’il ne bronche je le débarrassais de ses plumes puis de son
duvet. Une fois terminé, je me dis qu’il était temps de préparer ses compagnons
de cuisson. Entre autres, divers condiments, herbes, assaisonnements, de
quelques morceaux de beurre d’Echiré et 10 cl d’huile d’olive. J’ai choisi la
meilleure, une spéciale cuisson volaille des Baux de Provence. Sagement, je
mets ma pièce juste plumée dans un plat et le porte dans ma chambre froide pour
que la chair se raffermisse un peu. Je prépare ensuite les oignons, ail,
persil, laurier, thym, sel, poivre, huile d’olive… enfin tout ce qu’un bon
cuisinier a besoin pour faire de son plat un mets…Tout était prêt, chacun d’eux
m’aguichant de ses saveurs, ses odeurs, sa couleur pour mieux se préparer à
orner de mille bonnes choses ce monde d’épices, d’herbes ou de condiments sans
quoi la bonne cuisine ne pourrait être ce qu’elle est. Mon plat habituel, un
plat en terre, assurera une égalité des températures pendant la cuisson. Fier
de moi, j’exultais déjà d’aller chercher ma volaille et d’en faire cette
cuisson à l’envers que j’affectionne tout particulièrement. Je me voyais déjà
découpant chaque cuisse, bien arrosées de leur jus aux articulations encore
fumantes, témoignage d’une bonne cuisson et de saveurs à faire pâlir les
meilleurs gourmets. Puis, j’attaquais les blancs si souvent secs chez les
autres, mais eux aussi cuits juste comme il faut et humidifiés à souhait. Quant
aux sots l’y laisse je les mettrai de côté pour une petite omelette aux œufs
frais et aux morilles. Ils seront accompagnés avec bonheur de quelques frines
et d’un verre de vin jaune…j’en étais là, sous le charme des saveurs dont je
rêvais, que je sentais, et que mes papilles aux abois attendaient avec
l’anxiété que je leur con
nais à ces moments. Il était temps d’ouvrir la porte, gardienne du temple du bien manger et parfois du bien boire.
Je l’ouvre …Mais mal m’en a pris, notre seigneur de Bresse, Prince de basse- cour du haut Lyonnais transis de froid, ayant retrouvé toute sa vigueur, à la vue de la porte grande ouverte, sauta sur le sol et s’engouffra dans l’ouverture en courant de ses petites patoches le plus vite qu’il put et partir le plus loin possible. J’en restais bouche-bée…Reprenant mes esprits, je me mis à courir après lui bientôt suivi de mon équipe toute entière. Au passage, j’attrapais mon épuisette à poissons, pendue à un clou !!!
Imaginez…4 cuisiniers, dont un
l’épuisette à la main et quatre autres mitrons toques sur la tête courant après
un poulet sans plume gloussant toutes les notes de son corps…Pour parfaire la
scène, les cris…il est là, non ici, je l’ai non il s’est échappé sauf qu’à la
fin lui et nous furent fatigués de courir, il s’arrêta. Il fit face à la meute
qui le poursuivait, gratta le sol des ergots de sa patte gauche, celle qui lui
sert à dormir, et oui un poulet dort toujours sur sa patte gauche et replie la
droite pendant son sommeil, c’est d’ailleurs celle qu’il faut manger car elle
est la plus grosse, la plus ferme. Je croyais revivre la scène du taureau face
à son toréador au moment du final tragique, là où l’épée le transperce entre
les deux yeux et où il s’effondre. N’écoutant que mon courage, le Chef que je
suis, fait face à la bête encore tout crête dehors. Je lançais alors le filet
de mon épuisette qui retomba sur la bête enfin prise au piège.
Emprisonné, sonné, je l’ai mise sous mon bras et m’en retournais dans mes cuisines avec une certaine fierté du travail assuré.
nais à ces moments. Il était temps d’ouvrir la porte, gardienne du temple du bien manger et parfois du bien boire.
Je l’ouvre …Mais mal m’en a pris, notre seigneur de Bresse, Prince de basse- cour du haut Lyonnais transis de froid, ayant retrouvé toute sa vigueur, à la vue de la porte grande ouverte, sauta sur le sol et s’engouffra dans l’ouverture en courant de ses petites patoches le plus vite qu’il put et partir le plus loin possible. J’en restais bouche-bée…Reprenant mes esprits, je me mis à courir après lui bientôt suivi de mon équipe toute entière. Au passage, j’attrapais mon épuisette à poissons, pendue à un clou !!!
Emprisonné, sonné, je l’ai mise sous mon bras et m’en retournais dans mes cuisines avec une certaine fierté du travail assuré.
Il passa vite cette fois de la vie au trépas, juste
quelques secondes. Je récupérai son sang pour une sanguinette bien gagnée mais
pour ça, nous verrons plus tard…Il était temps que cette comédie cesse et que
notre Bressan d’origine fasse la connaissance de mon four pour une séance de
bain rayonnant de quelques heures. Dans mon beau plat de grès, parés de ses
condiments qu’il affectionne particulièrement, la bête est mise au four froid
pour un bronzage très mode mais sans plus.
Pas de fioritures excessives, juste un espoir qu’il
soit encore
meilleur que la dernière fois…et sans cérémonial particulier, la cuisson démarra…à froid comme il se doit à une température de 90°C.
meilleur que la dernière fois…et sans cérémonial particulier, la cuisson démarra…à froid comme il se doit à une température de 90°C.
2 heures plus tard mon vœu était exhaussé, et l’aspect
cuisson réussi. Il était recouvert d’une belle robe dorée, parfois plus foncée,
parfois plus clair. Le tout enjôlé de très belles odeurs olfactives qui
ravivèrent de suite mes papilles toutes en gourmandises dans un ballet explosif
de sensations juteuses encore inassouvie. Une fois sorti du four….
Il me restait à le découper. Les cuisses d’abord
furent disjointes et comme je le pensais regorgèrent de jus aux articulations.
Je les rangeais délicatement au fond du plat de service, puis ce furent les
blancs que je découpais à la cuillère comme autrefois. Et oui, un poulet ne se
découpe pas au couteau mais à la cuillère. Chaque blanc rejoignit avec
délicatesse les cuisses. Je les arrosais délicatement avec le jus de cuisson et
filtrais le reste pour le mettre dans la saucière. La farce récupérée fut
partagée entre les morceaux. Les frines (pommes parisiennes cuites à l’eau mais
dorées et croustillantes comme les frites parisiennes traditionnelles) étaient
déjà servies sur table, le vin jaune à la bonne température dans les verres
adéquats et le gros pain de campagne bien présent, trônant de sa superbe miche
encore tiède, témoignage d’une cuisson proche, mais légèrement tiédi dans mon
four encore chaud. Il était enfin temps de passer à table.
Le poulet était là, tous n’attendaient que moi…Je
rejoignais mes invités. A mon entrée dans la salle à manger chacun leva son
verre à ma santé !!! Salud !!!
Mais, à ce moment-là, je me suis réveillé j’étais dans
mon lit et j’étais en plein rêve….
Adieu sanguinette, adieu poulet, adieu omelette aux
morilles et sot l’y laisse, adieu plaisirs et voluptés, adieu odeurs et
saveurs, adieu…Mon beau poulet de Bresse s’était cette fois bien envolé et moi
il ne me restait plus que mes yeux pour pleurer…
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