La chasse aux indices commence......Episode 52


 Elle a juste posé le combiné du téléphone, que la sonnette de la porte d’entrée retentit.. Elle regarde par la fenêtre entr’ouverte et aperçoit le père de Pierrot attendant qu’on veuille bien lui réponde.
Son père traverse le petit jardin et lui ouvre le portillon en lui tendant la main :
« - Bonjour André, c’est un plaisir de t’accueillir à la maison, c’est si rare. Quel bon vent t’amène. »
André :
« - Bonjour, Claude excuse-moi de te déranger un samedi, mais je livre des veaux à Martial pour qu’il les abatte et, comme je passe devant chez toi, je me suis arrêté car j’ai un petit souci avec mes enfants. »
Claude :
« - Pas bien grave j’espère, mais entre, tu as bien fait de venir, j’apprécie cette confiance. »
Il l’invite à pénétrer dans la maison et s’assoient au salon. Il lui demande ?
« - Vu l’heure tu pendras bien un café, je viens de le faire. Je suis seul avec ma fille, ma femme est partie faire des courses à Saint-Jean comme chaque samedi.
André :
« - Merci, ce sera avec plaisir, ta femme va bien, les enfants aussi… »
Claude
« - Tout va bien, impeccable, mieux serait désagréable et Tapioca est devenue une vraie bombe à l’école. Ils se font la guerre avec ton fils pour obtenir la première place de la classe. Tous les soirs nous y avons droit, Pierrot par ci, Pierrot par là. Ma femme et moi sommes fières d’elle et elle toujours folle amoureuse de Pierrot, c’est son dieu. » 
Il lui sert le café et comme c’est la coutume en Charentes, sort la bouteille de gnaule faite maison. Je vais te faire goutter ma dernière-née, même si je n’ai pas ta réputation d’œnologue, cette année, je l’ai bien réussie. Goûte et donne-moi ton avis. Je connais la qualité de ton jugement. C’est la même recette que mon père faisait, je n’y ai pas changé une seule virgule.»
André est flatté et après “un tchin “de bon aloi, il avale d’un trait le verre de gnaule et le repose sur la table. Claude veut lui en resservir une seconde rasade, mais André pose sa main sur le verre et refuse.
« - Merci Claude, elle est remarquable, mais je conduis ma voiture avec deux veaux derrière, je ne veux pas faire d’imprudence. Je connais ta maison et je sais que tu as pour moi les yeux de Chimène, je te promets de revenir prendre la goutte un de ces jours. Voilà Claude, j’ai un problème avec Pierrot et je voudrais vérifier ce qu’il a fait jeudi. Comme nos gosses ne se quittent pas, je souhaiterais que Tapioca me confirme ce qu’ils ont fait jeudi dernier dans l’après-midi. »
Claude ;
« - La voilà qui rapplique, tu n‘as qu’à lui demander toi-même. »
Tapioca en curieuse, vient s’informer des raisons de l'’intrusion chez elle, du père de Pierrot.
Tapioca :
« - Bonjour, Monsieur Hillairet, si vous cherchez Pierrot, il n ’est pas ici. »
Bonjour, ma petite Tapioca.
« - Non je ne cherche pas Pierrot, je crois qu’il aide monsieur le curé. Je souhaite simplement te demander ce que vous avez fait ce jeudi après-midi ? »
Tapioca :
Monsieur Hillairet depuis l’histoire des papillons, je ne sais pas pourquoi, Pierrot me bat le froid, j’ai l ’impression qu’il m’ évite et qu’il est fâché contre moi. Je crois qu’il voulait que le Maître nous les rende. Au contraire, j’ai pensé qu’il fallait les laisser à l’école pour que les autres élèves en profitent et que nous fassions une exposition pour les parents. La classe a voté et c’est moi qui est gagné, mais il s’est vexé, depuis, il boude. Donc jeudi, je suis allée seule avec Saucisse et Gros Lard à la chasse aux papillons du côté du cimetière. » 
André :
« - Justement ce jeudi, il a ramené d’ autres objets à la maison et il ne veut pas les montrer, ni dire d’ où ils viennent, je ne voudrais pas qu’il les ait volés. »
Tapioca :
« - Pierrot voleur, comment pouvez-vous penser ça ? La seule chose que je sache, c’est que le vieux monsieur est revenu. Pierrot l’aurait rencontré en cachette, sans le reste de l’équipe. Depuis quelques jours, il nous tient à l’écart et ce n’est pas très gentil de sa part. »
André :
« - Mais qui est ce vieux Monsieur Tapioca, personne ne le connaît, c ’est un peu ennuyeux et l’ on ne sait jamais… »
Tapioca :
« - Je n’en sais rien Monsieur Hillairet. Il y a un mois environ, il pleuvait, nous étions allés vers la gare pour nous abriter. Nous l’ avons rencontré par hasard et nous l’ avons aidé à porter ses colis sous la pluie, à la gare nous avons parlé un peu tous les six, il nous a proposé les papillons en remerciement de notre aide. Ils sont maintenant à l’ école et depuis personnellement, je n’ai plus eu aucune nouvelle de Pierrot. »
André :
« - Et comment as-tu appris qu’ils s ’étaient revus ? »
Tapioca :
« - Ce sont Gros Lard et Saucisse qui me l’ ont dit. Ils sont au courant des objets et du papillon dans une cage. Gros Sel en a parlé avec eux à l’école et ils me l’ ont répété. »
André comprend qu’elle ne sait rien de plus. Ce n’ est même pas la peine qu ’il aille voir Gros Lard et Saucisse, ils ne lui apprendront rien  qu’il ne sache déjà. Il  perdrait un peu plus du peu temps qu’il lui reste. Tapioca a l’ air si sincère, il peut lui faire confiance.
L’ entretien se termine et Claude dit à André :
« - Ce sont des histoires de gosses, elles sont toujours pleines de mystères et  rocambolesques depuis quelques temps, c’est leur âge qui veut ça. Nous aussi nous avons été jeunes. Ah André, j ’oubliais puisque tu es là, j ’aimerais que tu me vendes une ou deux bouteilles de ta gnaule dont tout le monde me parle. Je voudrais faire un étalonnage de comparaisons gustatives si tu me le permets. Autant, que je me compare à meilleur que moi… »
André flatté se gonfle comme un paon:
« - Claude, tu connais mon adresse, passe quand tu veux, ma porte t’est grande ouverte, tu le sais. J’ en ai toujours quelques bouteilles d ’avance. À la maison, tu seras toujours chez toi et excuse moi de t’ avoir dérangé. Au revoir Tapioca, tu sais les amours de jeunesse...…Ah j’ oubliais une dernière question...…Gros Sel nous parle souvent d’une fille, tu la connais ? »
Tapioca :
« - Peut-être, mais il faudrait me dire au moins son nom. » 
André :
« - Elle a un drôle de nom, ce doit être comme pour toi, un surnom, je crois qu’elle s’ appelle « La Goulue. »
Tapioca, en attendant ce nom dans la bouche d ’André est tétanisée, mais elle se ressaisit très vite :
« - Non elle n ’existe pas, c ’est une invention de Gros Sel pour me rendre jalouse, il a le don de me mettre en colère avec ça. »
André :
« - Je sais, il lit trop d’histoires et fabule tout le temps, ce midi, il nous en a raconté une et s’est vexé quand on s’ est moqué de lui. Il parlait d’indiens dans la préhistoire, j’en ai eu vite marre. »
 Tapioca :
« - Il est trop mignon et nous fait toujours rire. Chacune de ses histoires fait toujours dans le sensationnel.»
André prend enfin congé au grand soulagement de Tapioca, il regagne sa voiture et livre ses bêtes à la boucherie du village. Il se dépêche car il doit encore se rendre quelque part, avant son rendez-vous de cinq heures. Il est trois heures, il lui en reste deux, donc tout va bien, il est dans les temps.
En moins d ’une heure, les bêtes sont déchargées à l’abattoir, les papiers signés et Martial Hervé, le paie en billets de banque tout neuf. Il les met dans sa poche en pensant qu’un bon tient, vaut mieux que deux tu l’ auras . Toucher des billets neufs du bout de ses doigts, est un plaisir dont il ne se lassera jamais. Il quitte l’abattoir satisfait, remonte dans sa voiture, et se dirige vers la gare.
Il doit absolument avoir un entretien avec le chef de gare. C ’est un copain de sa cellule politique, et s ’il a parlé à ce fameux vieux monsieur, il doit l’ entendre de ses propres oreilles. Arrivé devant l’ entrée de la petite gare, il se gare, descend et pénètre dans le hall. À cette heure il n’ y a personne, mais en passant devant le seul guichet, il aperçoit le crâne chauve du chef de gare penché sur ses papiers, il lui semble qu’il téléphone.
André ressort sur le quai, tourne sur la gauche et va frapper à la petite porte du bureau. Dans un village où vivent moins de mille âmes, tous se connaissent. Tout en lisant des papiers, il répond au téléphone pour le service.
André frappe trois coups brefs et secs sur un carreau. Il lève la tête et aperçoit André qu ’il reconnaît aussitôt. Sa face s’illumine d’un large sourire plein de sympathie et de sa main encore libre, lui fait signe d’entrée dans son bureau. C’est un honneur, car elle est réservée au service et reste interdite au public non autorisé.
André pousse la porte et avance dans la petite pièce. Le chef de gare de son pouce levé, lui fait signe qu’il en a pour une petite minute. Il lui montre une chaise pour qu’il se pose. Le temps qu’il le fasse, la communication se termine. Il repose le combiné noir sur son socle et retire sa casquette en s ’exclamant : « - Bonjour André, pour une surprise, c’ est une surprise, c’ est bien la première fois que je vois dans mon bureau le patriarche de la famille Hillairet. Pourtant nous sommes de la même famille. J ’ai toujours ma carte de la CGT, celle du parti et je suis à jour de mes cotisations. Rouge je suis né et rouge je resterai. Je suppose, que c ’est pour me parler du parti et des élections qui s ’approchent, que tu es venu. Nous allons les gagner cette fois. La dernière élection, nous n’avons perdu que de trente voix, c’est peu. L ’usine a embauché des ouvriers pour le nouvel atelier, nous avons au moins 10 inscriptions en plus, aucune résiliation. Tous habitent le grand lotissement neuf et votent dans la commune. C’est dans la poche André, j’ en suis sûr, c’ est gagné.» 
André :
« - Les voix de l’ usine Adrien, il faut s’en méfier, ils ont peur pour leur travail, le chantage, toujours le chantage, le syndicat n ’est pas encore assez puissant. Avec une prime à 4 sous, ils se laissent acheter, cela fait vingt ans que ça dure, je connais la musique. Ce sera dur encore cette fois, ne te fais aucune illusion. Le maire a le contrôle sur tout. C’ est dégueulasse, mais c’ est un fait. »
Adrien:
« - Bien, André, si tu me disais les raisons de ta visite, tu n ’as pas la réputation de te déplacer pour rien. »
André :
« - Je ne viens ni pour le parti, ni pour les élections, mais pour une enquête personnelle et j’ ai besoin de vérifier certaines choses. »
Adrien soucieux prend un air contrit :
« - J ’espère que ce n’ est pas grave. »
André :
« - Je ne crois pas, mais les enfants me posent quelques soucis. »
Adrien :
« -  Tes enfants, plains-toi. Tout le village t’ envie ! Ils sont polis et très gentils. Tiens par exemple, l’ autre jour, il pleuvait et sont venus s’abriter à la gare toujours ouverte pendant le jour. En chemin, ils ont rencontré un vieux monsieur en difficulté sous la pluie. Ils l ’ont aidé en lui portant ses colis et ils étaient tous là assis à discuter sur le banc de la salle d’ attente en attendant que la pluie cesse. Je les ai laissés, car il y avait les tiens et qu’il pleuvait averse. Quand la pluie a cessé, ils sont repartis sagement. » 
André :
« - C’est justement de ce vieux monsieur à qui tu as parlé dont je souhaite t’ entretenir. Leur relation m’ inquiète et j’aimerais bien savoir qui il est. Tu le connais ? »
Le Chef de gare ne peut pas se déjuger, et il reconnaît lui avoir parlé quelques instants, comme il le fait souvent avec les usagers, quand ils prennent leur billet.
André :
« - Jeudi, tu étais de service ? »
Adrien :
« - Oui, c’ est un des jours où il y a toujours beaucoup de monde. Le jeudi, nous sommes tous sur le pont. Je suis tous les jours de service, sauf le dimanche, mais actuellement nous manquons de bras. »
André en regardant sa montre :
« - L ’aurais-tu revu jeudi ? » 
Adrien :
« - C ’est vrai que le jeudi, comme je viens de te dire, il y a beaucoup de monde qui monte ou descend et je ne suis pas à tous les regarder sous le nez. Je dois donner les billets à ceux qui partent et contrôler ceux qui descendent. Donc, ce doit être jeudi soir que je l’ ai aperçu, quand il est reparti.
André :
« - Tu ne l’ a pas vu arriver ? »
Adrien :
« - Non, le matin, il n’ y a que trois  trains, un à 6 heures 30, l’autre à 9 heures 30 et le troisième à 12 heures 30. Je l’ aurai vu. Il a dû arriver par d’ autres moyens, mais je suis sûr de l’ avoir vu repartir.
André voyant l’heure tourner doit maintenant renter chez lui, il est temps de prendre congé d ’Adrien en le remerciant chaleureusement. Si tu l’ aperçois, appelle-moi aussitôt, je dois absolument lui parler.
Adrien :
« - À demain, j’espère te voir au stade de foot, nous jouons la première place contre La Pallice, c’ est du sérieux. Viens au match, nous boirons une bière à la fin du match, ce sera ma tournée. Je n’ ai rien à t’ offrir ici, service oblige, mais demain au terrain, c ’est moi qui rince, c’ est promis. » 
André :
« - Le dimanche, c’ est le jour où je fais mes comptes, mais je ne suis pas venu pour boire un coup, merci et surtout n’oublie pas de m ’appeler si tu le revois. » 
Adrien :
« - Promis André, fais- moi confiance. »
André le quitte et remonte dans sa voiture pour rentrer à la ferme. Il lui reste dix minutes avant leur précieux rendez-vous. Au volant, il réfléchit. Il va être désormais difficile à ce personnage de remettre les pieds à Loulay incognito. Il sera immédiatement repéré. Il doit absolument le rencontrer, il est la clef de cette affaire. Quelques minutes plus tard, il regagne sa maison, où toute la famille est déjà là, à l’attendre.

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